
"La calleuse volupté de vivre", c'était le thème du concours de nouvelles organisé en 2024 par le Cercle littéraire Pieussan Joseph-Delteil, où Feu follet s'est distingué. Cette nouvelle, qui donne la parole à un adolescent confronté pour la première fois à la mort, a obtenu les Félicitations du jury.
La nouvelle a été publiée en intégralité sur le site du Cercle.
Extrait
Papi voulait être enterré dans son champ avec son âne, mais ça a pas été possible, alors Maman a choisi la crémation, pour répandre ses cendres chez lui, sur sa terre.
Je crois que c’est pas très légal, mais on l’a fait quand même, Maman et moi, juste tous les deux. Il y avait comme des petits morceaux durs dans les cendres, c’était trop pas cool. Pas du tout comme dans les films.
Ça a pris trois secondes de vider l'urne, alors que Maman a pris vingt ans d’un coup. Même plus.
Après j’ai fait mon feu follet, j’ai filé dans mon tilleul tout fleuri.
Je me suis posé au creux de sa main géante, j’ai agrippé une branche.
Comme le gros doigt de Papi quand j’étais tout pitchoun.
J’ai regardé ma mère couper du lilas, toute petite, en bas, et disparaître dans la maison. Pour transformer l’urne en vase, à tous les coups.
Ça aurait bien fait marrer Papi.
Je suis resté perché là.
Longtemps.
J’ai laissé le temps couler, sans bouger.
J’ai laissé le vent me parfumer les cheveux.
J’ai laissé mes larmes dévaler mes joues librement sans un bruit.
J’ai laissé l’arbre me donner sa force.
Le soleil me donner sa force.
Immobile.
Juste le cœur battant dans les tempes.
Un écureuil qui filait a bondi sur place en me voyant au dernier moment. Un ressort.
Je me suis entendu rire.
L’enfance était derrière moi, mais la vie était devant.
L’enfance est derrière moi, mais la vie est devant.